
Les résultats de l'édition 2025 du Baromètre de confiance politique du CEVIPOF (Sciences Po) montrent une fois encore que la confiance interpersonnelle est plutôt faible en France, notamment si on la compare à l'Allemagne ou aux Pays-Bas. 69 % des Français interrogés considèrent ainsi qu’on n’est jamais assez prudent quand on a affaire aux autres, contre 55 % des Allemands et 51 % des Néerlandais sondés. Ces résultats sont relativement stables depuis 2020.
Et pourtant, une enquête récemment publiée par le think tank Destin commun sur le thème du "bonheur à la française" indique que les liens sont l’une des clefs du bonheur aux yeux des Français, notamment aux yeux des seniors… et des personnes qui ne se disent pas heureuses.
Ainsi, pour 20 % des Français interrogés, le bonheur, "c’est aimer et être aimé". C’est le cas pour 28 % des Français peu ou pas heureux. En outre, la solitude est largement perçue comme une entrave majeure au bonheur. 18 % des personnes plutôt ou très heureuses disent souffrir de solitude. Ce chiffre s’élève à 61 % pour les personnes plutôt pas ou pas heureuses. Ainsi que l’affirme Destin commun, "ces chiffres illustrent l’impact prégnant de la solitude sur le bien-être individuel et le bonheur", d’autant que "l’isolement relationnel fonctionne comme un cercle vicieux : il accroit le sentiment de menace et la peur de l’autre, et diminue ainsi le désir de rencontrer d’autres personnes".
La réponse réside sans aucun doute dans la promotion d’une société des liens. Une enquête publiée fin 2024 par la Fondation Jean Jaurès, "réhumaniser la société de l'absence", révélait que la soif de lien des Français était le "corollaire de cette société de l’absence – et notamment d’absence d’humain" et un "élément central du modèle de société souhaité".
En effet, même si "de prime abord, [cette] étude semble démontrer qu’il n’y a plus aucun commun dans notre société", les auteurs n’en identifient pas moins "quelques communs [qui] semblent se dessiner autour des notions de solidarité et de proximité (ce qui manque le plus aux Français et à la société […]). On sent poindre un désir commun de réhumanisation". Cela a été le cas durant les JO de 2024 : à ce moment-là, en effet, "nous avons assisté à une réhumanisation de la société qui a permis de réguler les tensions et les incivilités, entraînant de fait un climat plus apaisé et plus serein qu’à l’accoutumée".
Il en est de même pour le dernier rapport de La Fabrique Spinoza, qui vient d’être publié et qui s’intitule d’ailleurs "La société des liens" avec comme sous-titre "les liens sociaux pour répondre aux grands enjeux de société". Il défend par conséquent l'idée que les liens sociaux sont à même de répondre aux multi-crises que traverse notre société :
Crise existentielle : une célèbre étude de l’université Harvard a montré que les liens sont le premier "facteur de bonheur d’une vie"
Crise sanitaire : d’après cette même étude, les liens sociaux sont le premier facteur de santé, alors que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a révélé que la solitude tue davantage que le tabac
Crise de la jeunesse : 1,6 million de jeunes français souffrent de troubles psychiques
Crise du travail : les liens sociaux sont la première demande au travail
Crise des territoires : beaucoup de Français souffrent de ce que la Fondation Jean Jaurès a appelé "la société de l’absence", comme on l'a vu
Crise de la démocratie : la faible confiance interpersonnelle mine la démocratie
Crise sécuritaire : le lien social est "co-producteur de sécurité"
Crise écologique : le lien social tend aussi à favoriser les comportements écologiques
La Fabrique Spinoza en conclut que "les liens sociaux sont donc bénéfiques mais surtout opérants, voire fondateurs de l’action dans toutes les sphères de la société. Ils sont alors un principe d’action politique crédible et efficace pour une société plus fonctionnelle, plus fraternelle et plus heureuse ? Les collectifs (y compris spontanés) en liens sont le maillon manquant entre individu(s) et institutions. Ils font des ‘citoyens en liens’ des co-producteurs de services pour la cité". Il paraît donc indispensable, ainsi que le prône La Fabrique Spinoza, de promouvoir la "Société des liens" avec l'espoir d'entrer dans qu’elle qualifie de “Les Trente Relieuses”.
L’Observatoire avait d’ailleurs publié en 2024 une chronique du positif sur ce sujet : "Non, l’argent n’a pas plus de valeur que les amis".
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