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Les chroniques du positif : Comment réhabiliter le discours positif

  • Photo du rédacteur: eddyfougier
    eddyfougier
  • 18 sept.
  • 6 min de lecture
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Ne tournons pas autour du pot : même si les bienfaits de l’optimisme sont régulièrement démontrés par les scientifiques, tout comme les méfaits du pessimisme d’ailleurs, force est de constater que le discours positif ne passe pas très bien. C’est le cas en particulier en France. On peut accuser les médias et d’autres acteurs ou mettre l'accent sur une forme d’exception française, cela ne va pas changer grand-chose.


C’est un peu la même problématique que pour le discours sur le climat basé lui aussi sur la science, mais qui se heurte souvent à une forme d’indifférence, voire quelquefois à une hostilité. Dans les deux cas (optimisme, climat), il faut donc se poser la question du messager, de la nature du message, de la cible de celui-ci et du canal via lequel il est exprimé.


Le message positif se heurte, en effet, à deux visions bien ancrées dans la tête de la plupart d’entre nous (et contre lesquelles il est nécessaire de lutter) :


  • (1) Etre réaliste, c’est être forcément pessimiste et même désormais un peu catastrophiste, sinon c’est de l’irréalisme.

  • (2) L’information (news) que l’on peut voir dans la presse et les médias ne peut être que négative et notamment dramatique (conflits, tensions, violences, accidents, catastrophes, faits divers, scandales, controverses), sinon ce n’est pas vraiment de l’info, c’est du divertissement, de l’infotainment.


 

Le messager


Qu’on le veuille ou pas, il convient, en premier lieu, de tenir compte de l’existence de nombreuses idées reçues sur les optimistes :


  • L’optimiste est souvent vu comme quelqu’un de naïf et de crédule : c’est une sorte d’imbécile heureux, renvoyant quelque peu au fameux Candide de Voltaire.


  • Il est hors-sol, déconnecté de la réalité ou même dans le déni, dans la négation de celle-ci qu’il ne veut pas voir.


  • Il est insensible à la misère du monde, à la souffrance de ses contemporains, c’est un "cœur de pierre".


  • Il est du bon côté, du côté des privilégiés : il est optimiste car tout va bien pour lui. En définitive, il est donc un peu égoïste.


  • Au final, l’optimiste n’apparaît pas comme quelqu’un d’intelligent et, par conséquent, comme quelqu’un à qui l’on peut se fier.


  • Le message optimiste pâtit aussi du fait d’être assimilé à un discours de "puissants" car c’est le discours des gouvernements, des élus, des grandes entreprises, des marques ou des institutions internationales, de toutes celles et ceux qui ont un pouvoir et qui tentent de nous convaincre que tout va bien et que tout va bien se passer grâce à eux (à leur politique, ou à leurs produits ou services).


  • Ce message pâtit aussi sans doute, aux yeux de certains, du fait d’être assimilé à la pensée positive, à la méthode Coué, aux recettes toutes faites d’un certain développement personnel, voire au biais optimiste et à une positivité toxique, nous conduisant à ignorer soit les risques (biais optimiste), soit les émotions négatives (positivité toxique).


 

La nature du message


Il est également nécessaire de prendre en compte la façon dont le message optimiste et les informations positives sont souvent perçus par un grand nombre de personnes :


  • Les messages positifs peuvent quelquefois donner l’impression d’être exprimés par des individus qui n’ont pas de problèmes et d’être destinés à des individus qui n’ont pas de problèmes. On ne serait pas, en l’occurrence, dans du B to B (Business to Business) ou du B to C (Business to Customer), mais dans du CSP+ to CSP+, soit un discours de catégories favorisées à destination de catégories favorisées. Cela renvoie quelque peu aux images que l’on voit souvent dans les publicités : des régimes alimentaires pour des personnes déjà minces ou des conseils pour rester en forme pour des personnes jeunes, sportives et en pleine santé.


  • Les messages positifs s’adressent le plus souvent à l’individu en tant que personne, mais peuvent être déconnectés de l’environnement dans lequel celui-ci évolue et, plus largement, de l’état du monde. On peut être "reboosté" après avoir assisté à une conférence sur l’optimisme et la pensée positive. Mais, une fois que l’on rentre chez soi, on va allumer la télévision et regarder une chaîne d’info avec toutes les horreurs du monde. Dans ce cas, les positivistes peuvent donner l’impression d’être un peu l’équivalent de l’orchestre du Titanic, qui continue à jouer alors que le navire a déjà heurté l’iceberg et qu’il commence à couler.


  • Les informations positives sont souvent perçues comme rares à partir du moment où l’on considère généralement que les news ne peuvent être que négatives. Elles ne font jamais la "Une" des journaux ou l’ouverture des JT.


  • Si elles existent, les infos positives ne peuvent que relever des rubriques "divertissement" ou "insolite". Quoi qu’il en soit, elles ne sont pas vraiment vues comme de l’information sérieuse. C’est de l’info qui prête à sourire avec des vidéos d’animaux sympas et rigolos, mais sans plus.


 

La cible des messages


  • Il faut sans doute se rendre compte du fait que les messages et les informations positifs touchent le plus souvent un public déjà "captif", mais sans doute insuffisamment les individus qui sont inquiets de l’état du pays et du monde et a fortiori ceux qui sont foncièrement pessimistes tant sur le plan personnel que sur le plan collectif (et qui plus est, qui vont tendre à se méfier des messages positifs délivrés par les détenteurs de pouvoirs). Ces derniers sont, par exemple, des individus appartenant aux catégories populaires, peu ou pas diplômés, ne résidant pas dans de grandes agglomérations…


  • Comme pour le climat, on se heurte aussi sans aucun doute en la matière au "Not here, not now, no me" : pas ici, pas maintenant, pas pour moi. Les informations positives qui concernent les pays pauvres (recul de la pauvreté extrême et de la mortalité infantile, hausse de l'espérance de vie, amélioration de l'accès à l’éducation, à l’eau…), en quoi ça me concerne ? Ce n’est pas nécessairement quelque chose de positif pour ici. Les infos positives sur des innovations, des percées médicales ou des découvertes scientifiques, c’est bien, mais ce n’est pas pour maintenant, c’est sans doute dans l’avenir que l’on pourra en voir les conséquences concrètes. Et quoi qu’il en soit, ces innovations et ces percées médicales, ce ne sera pas pour moi. Elles seront vraisemblablement d’abord destinées à ceux qui auront les moyens de se les payer. Au final, même si une partie de la population peut reconnaître l’existence d’infos positives, elle peut être amenée à penser que cela ne la concerne pas trop, que cela n’a pas d’impact sur sa vie de tous les jours et sur ses préoccupations concrètes (généralement centrées autour de l’argent, de la santé, de la sécurité… si l'on en croit les résultats d'enquêtes d'opinion).


 

Le canal de diffusion des messages


  • Enfin, il est important de se poser la question du canal car, par exemple, les médias qui diffusent des infos positives sont peu connus du grand public et pas toujours facilement accessibles.


  • Par ailleurs, les conférences destinées à des cadres d’entreprises ne touchent pas vraiment le grand public.


 

Au final, on voit bien que le positif tend à se heurter à trois formes de déconnexions :


  • (1) Les messages positifs s’adressent plutôt aux individus qui vont bien en ignorant largement les autres.


  • (2) Les messages positifs s’adressent le plus souvent à la personne indépendamment de l’état du monde.


  • (3) Les infos positives soit ne sont pas considérées comme sérieuses, soit sont perçues comme éloignées des préoccupations quotidiennes de beaucoup de gens.


 

Cela signifie que, si l’on souhaite réhabiliter le discours positif, il va falloir procéder à un certain nombre de reconnexions :


  • Il faut tout d’abord déconstruire les deux affirmations qu’une grande partie du public a dans la tête : (1) Le réalisme consiste à voir la réalité telle qu’elle est, ce qui implique de voir aussi ce qui va bien, ce qui s’améliore et ce qui peut être source d’espoir, sinon on est dans une forme de déni. (2) Les informations positives sont à la fois abondantes et sérieuses. L’Observatoire du Positif, qui diffuse une info positive chaque jour depuis plus de quatre ans, peut en témoigner.


  • Il est aussi important d’élargir les cibles des messages positifs aux individus inquiets sur la situation actuelle et même aux individus pessimistes.


  • Il est tout autant crucial de tenter de combiner dans les messages positifs à la fois le réalisme et la positivité – Jacques Lecomte parlait à ce propos d’"optiréalisme" – et les dimensions personnelles et collectives.


  • Enfin, il convient, dans la mesure du possible, de faire en sorte que les infos positives soient plus accessibles au grand public et qu’elles "collent" davantage à leurs préoccupations quotidiennes.

 

 

 
 
 

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